Anne-Laure Thomas, directrice Diversité, Equité & Inclusion chez L’Oréal, revient, pour Décideurs Magazine, sur les engagements pris par le groupe afin de lutter contre toutes les formes de discriminations.

Décideurs. En quoi la diversité et l’inclusion sont-elles une politique stratégique et bénéfique pour les entreprises ? 

Anne-Laure Thomas. En France, il existe vingt-cinq critères de discrimination. Evidemment, ils ont tous leur importance. Pour gagner en impact, L’Oréal a choisi de rassembler le plus grand nombre de collaborateur.rice.s autour de piliers fondamentaux et stratégiques de l’entreprise : origines, handicaps, égalité entre les femmes et les hommes, employabilité des générations, la place des plus de 50 ans en entreprise, l’apparence physique et l’orientation sexuelle. 

Chez L’Oréal, nous pensons que la diversité est une richesse : il est essentiel d’avoir des profils divers, en provenance de toutes les origines, de tous les horizons, de toutes les cultures. Je suis convaincue que cela fait émerger des opportunités de travail, de créativité et d’idées extrêmement intéressantes. Les collaborateurs sont tous très attachés à l’humain et s’enrichissent des différences d’autrui. L’Oréal veut faire bouger le monde pour ses employés mais, aussi, pour ses consommateurs.  

Au sein du groupe, il est primordial que chacun puisse avoir la liberté d’être lui-même, qu’importe par exemple son origine, son sexe, son âge ou son orientation sexuelle. Tout le monde doit avoir le droit aux mêmes opportunités. Je suis certaine qu'une personne qui se sent à l’aise dans son environnement de travail donne le meilleur d’elle-même.  

Favorisent-elles l'attractivité des talents ? 

Tout à fait. L’Oréal recrute tout au long des étapes d’une vie mais il est vrai que nous disposons d’un pôle conséquent dédié aux jeunes. Aujourd’hui, un jeune sur deux est en recherche de sens, dans l’entreprise où il travaille. Tout d’abord, il faut leur donner envie de venir. Ensuite, nous devons faire connaître nos politiques afin que tout un chacun puisse postuler au sein du groupe. A mon sens, il est essentiel qu’il n’y ait aucune auto-censure. Tout le monde peut avoir la chance de rencontrer nos recruteurs.  

Afin de travailler sur notre attractivité, nous aimons donner la parole à nos collaborateur.ice.s. A ce propos, nous avons lancé une campagne, intitulée “No Filter”. Son objectif est de donner la parole aux collaborateurs, afin d’illustrer la diversité des profils L’Oréal. Vous pouvez entendre le témoignage de Georges, qui a grandi à Alep et qui explique son parcours de réfugié ; ou bien celui de Sylvie, ancienne intermittente du spectacle asthmatique dont le profil a nécessité certaines adaptations, afin qu’elle puisse travailler dans les meilleures conditions possibles. Et cela fait 30 ans que ça dure ! 

Par ailleurs, nous avons instauré un temps fort dans l’année : le Citizen Day. Il s’agit d’un jour banalisé durant lequel les collaborateur.ice.s peuvent s’engager auprès des associations partenaires du Groupe. 

L’Oréal lutte contre toutes formes de discrimination, notamment contre l’handiphobie. En ce sens, quelles initiatives mettez-vous en place ? 

La lutte contre les préjugés liés au handicap est un axe majeur et extrêmement important, chez L’Oréal. Dans 80% des cas, le handicap est invisible. Vous et moi pouvons avoir des collègues en situation de handicap, sans le savoir. En ce sens, le groupe a un vrai rôle à jouer. Nous tentons d’expliquer ce qu’est réellement le handicap, d’illustrer les différentes formes qu’il peut revêtir, afin d’accompagner les salariés qui le souhaitent. Bien entendu, la notion de handicap est totalement confidentielle : il s’agit d’une information qui reste entre le médecin du travail, l’assistante sociale et les ressources humaines. J’ai tendance à inciter les gens à en parler à leurs managers pour éviter tout quiproquo et maximiser l’accompagnement. L’Oréal s’engage vraiment à aménager autant que de besoins les postes des personnes en situation de handicap. Par ailleurs, 100% de nos recruteurs sont formés au handicap. Le groupe travaille également de concert avec des associations telles qu’Arpejeh - que nous avons créée - ou Tremplin Handicap, et sait s’accompagner d’experts.  

Nous travaillons également en interne, sur le volet formation. A deux reprises, nous avons organisé un Talk Handicap. Il s’agit d’un format Tedx au cours duquel des collaborateur.ice.s prennent la parole et expliquent leur situation, témoignent de ce qu’est leur vie avec le handicap. L’idée est de libérer la parole et d’inciter les personnes qui le souhaitent à parler de leur situation. 

"Au sein du groupe, il est primordial que chacun puisse avoir la liberté d’être lui-même, qu’importe son origine, son sexe, son âge, son handicap ou son orientation sexuelle."

Alors, comment faire évoluer l’image des personnes en situation de handicap ? 

L’Oréal partage ses bonnes pratiques. Les grands groupes sont, désormais, très engagés et il me semble que, concernant ces sujets, aucune compétition ne tient : nous sommes tous ensemble pour faire bouger les lignes. Par ailleurs, afin de faire évoluer les mentalités, nous soutenons des sportifs des jeux paralympiques, à l’instar de Maxime Vallet, qui fait du fleuret, Emmanuelle Morch dont la passion est le tennis ou encore Marie Bochet, qui a participé aux JO de Pékin. C’est “tous ensemble” que nous pourrons changer les choses et construire le monde de demain.  

Un autre sujet me semble très important : celui de la représentation des personnes en situation de handicap. Pour l’une de nos marques, Biotherm, qui s’engage pour la protection des océans, nous avons eu la chance de collaborer avec Théo Curin, un jeune nageur amputé des deux bras et des deux jambes. L’idée n’était pas de mettre en avant son handicap, mais sa personne.  

Que pensez-vous de la mise en place de quotas de femmes dans les instances dirigeantes ? 

D’une manière globale, je pense qu’il est essentiel de mesurer. Un état des lieux est nécessaire ; sans cela, il sera très difficile de progresser. Concernant la place des femmes, les formations au leadership sont primordiales.  

L’un de nos boosters de carrière est l’expatriation. Nous nous sommes aperçus que les expatriations étaient davantage acceptées par les hommes. Pourquoi ? Lorsqu’un homme part, la plupart du temps, la femme le suit. En revanche, l’inverse est moins vrai. En ce sens, le groupe s’est associé à d’autres entreprises, afin de trouver un emploi au conjoint, dans son pays d’accueil, et de permettre aux femmes de ne plus refuser les expatriations. Grâce à ces mesures, en dix ans, le nombre de nos collaboratrices expatriées est passé de 27% à 47%. 

La mesure des postes clés est également un levier d’action. Chez L’Oréal, 59% des directions de marques sont occupées par des femmeset 67% de nos collaborateur.ice.s promus ont été des femmes, cette année. Nous travaillons également sur la parentalité et avons allongé le congé du coparent à huit semaines et luttons contre le sexisme ordinaire. A ce propos, avec trente autres entreprises, le groupe a participé à la création du collectif “StOpE au sexisme ordinaire en entreprise”. Depuis le 25 janvier dernier, plus de 150 entreprises ont rejoint le collectif. Tous ensemble, nous allons bien plus vite dans la lutte contre le sexisme en France. 

D’ailleurs, L’Oréal avait mené une campagne avec la Fondation des Femmes ?  

Bien-sûr. La marque l’Oréal Paris, l’une des plus grandes marques du Groupe, s’est engagée auprès de la Fondation des Femmes, en France, afin de lutter contre le harcèlement de rue. Il s’agit d’une formation - “Stand Up” - dont la vocation est de former les victimes et les témoins d’une scène de harcèlement de rue. Toutes ces actions font que, le matin, nous sommes fiers de venir travailler pour le groupe. De plus, chacun peut en proposer de nouvelles : je crois qu’il s’agit, en quelque sorte, de notre devoir moral.  

Propos recueillis par Clémence Galland 

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